Elections ou social : Samy Badibanga à l’heure du choix
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Samy Badibanga, virtuel successeur de Matata Ponyo à la tête du gouvernement, connaît par cœur sa mission principale :
Amener le peuple congolais aux élections. Consignée dans l’Accord politique de la Cité de l’Union Africaine, elle lui a été rappelée par le Chef de l’Etat, Joseph Kabila, lors de leur première rencontre de prise de contact, le mardi 22 novembre 2016 au Palais de la Nation.
Dans une déclaration à la presse, le nouveau Premier ministre a indiqué être conscient de cette lourde responsabilité mais souligné que l’on ne devrait pas perdre de vue des actions à mener pour relancer l’économie nationale et améliorer le social des Congolais.
Les observateurs pensent que sur un front comme sur un autre, la tâche de Samy Badibanga ne va pas du tout être aisée. Les contraintes tant politiques que financières se présentent comme les principaux obstacles à la réalisation de sa mission. C’est l’heure d’opérer un choix : soit mobiliser tous les moyens pour les urnes, soit les canaliser vers les objectifs de développement. Le combat sur deux fronts, électoral et social, est exclu, à moins de courir tout droit vers un double échec. L’unique choix qui vaille, pour le moment, c’est celui de la normalisation du jeu démocratique par le retour vers le souverain primaire des candidats à la gestion de la Cité.
Contraintes politiques
Au moment où le nouveau locataire de la Primature s’apprête à y poser ses valises, l’horizon politique ne s’est toujours pas éclairci. Alors que la Majorité Présidentielle, l’Opposition et la Société civile signataires de ce deal politique donnent l’impression d’avoir lancé le train de la « période intérimaire » devant conduire aux élections à l’horizon 2018, les missions de bons offices, pilotées par la Cenco comme les diplomates tant africains qu’occidentaux, n’ont toujours pas mis fin à leurs navettes entre Gombe, Lingwala et Limete.
Des indiscrétions qui s’échappent des coulisses laissent penser à l’enregistrement de quelques avancées dans les tractations entre la famille politique du Chef de l’Etat, Joseph Kabila, et le Rassemblement des Forces Politiques et Sociales Acquises au Changement piloté par Etienne Tshisekedi, président de son Conseil des Sages. Il semble que plusieurs divergences seraient déjà aplanies entre les deux camps. Les convergences les plus citées concerneraient la période de transition, que les « Kabilistes » voudraient voir courir jusqu’à avril-mai 2018 et l’opposition pro-Tshisekedi s’arrêter en décembre 2017. Le principe de l’organisation jumelée des élections présidentielle et législatives nationales serait accepté de part et d’autre, sous réserve de fixation des dates précises pour leur tenue effective. Un gouvernement de transition ou d’union nationale serait naturellement mis sur pied, avec pour point focal l’organisation des élections.
Les sujets qui fâchent touchent au statut de Kabila en raison de la crainte de le voir rempiler pour un 3me mandat, à l’incertitude de financement du processus électoral au regard de l’amaigrissement continu du budget national, au maintien des prisonniers politiques et d’opinions dans leurs lieux de détention ainsi que des poursuites judiciaires contre les opposants, à la pollution du fichier électoral, à l’interdiction des manifestations publiques sur l’ensemble du territoire national, au mutisme du pouvoir quant à la recomposition de la CENI (Commission Electorale Nationale Indépendante) et du CSAC (Conseil Supérieur de l’Audiovisuel et de la Communication), à la structure de surveillance de la Transition, etc.
On ne voit pas le futur chef du gouvernement congolais prendre le risque d’organiser les élections dans un climat politique empoisonné par l’absence de consensus entre la Majorité présidentielle et le Rassemblement des Forces Politiques et Sociales Acquises au Changement. Un passage en force serait de tous les dangers, surtout que la communauté internationale, à laquelle s’est joint le Saint Siège, fait pression sur tous les protagonistes de la scène politique congolaise pour que la crise de légitimité au sommet de l’Etat soit réglée par l’organisation d’une transition apaisée, avec au bout du compte, des élections démocratiques, transparentes et crédibles.
Contraintes financières
Bien que le volet financier ne soit pas suffisamment souligné dans l’analyse de la crise congolaise, chacun peut constater que si les acteurs politiques congolais s’entredéchirent en cette fin du second et dernier mandat de Joseph Kabila, c’est à cause du manque de financement des élections dans les délais légaux. Par conséquent, même si un compromis politique est dégagé d’ici le 19 décembre 2016, le calendrier électoral peut de nouveau imploser si la volonté politique de disponibiliser les fonds pour amener les Congolais aux urnes, fait de nouveau défaut.
A cet effet, les perspectives économiques du pays ne peuvent pas pousser à l’optimisme. La question que l’on est en droit de se poser est de savoir si le milliard de dollar américain que le gouvernement n’avait pu dégager lorsque les budgets nationaux affichaient des « pics » de 8 et 9 milliards de dollars peut être décaissé facilement
avec une enveloppe globale de 5,6 milliards Usd pour l’exercice 2017.
Les cours des matières premières poursuivant leur courbe descendante, une nouvelle chute du budget national est à craindre, avec une lourde hypothèque sur les élections présidentielle et législatives nationales.
Kimp
