JUSTICE : "Magistrat instructeur membre de la présidence, preuve d’un acharnement politique contre Biselele". (Tribune de Maître Gabin Mutshaila )
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Rédaction
"Que de scandales de subordination des magistrats au pouvoir politique dans le dossier Biselele. Le dernier en date, et non des moindres, est le fait que le magistrat qui instruit l'affaire et qui joue aujourd'hui le rôle de ministère public est en même temps membre du personnel administratif et politiqude de la présidence de la République. Une gravissime violation de la constitution et des lois congolaises ainsi que de toutes les règles internationales connues en la matière", souligne cet Expert de droit.
En effet, précise Maître Mutshaila, "comme toute profession, la magistrature est tenue à une certaine éthique qui doit caractériser son fonctionnement et le parcours professionnel de ses membres afin de mener à bon port leurs tâches. Ainsi, l’article 150 de la Constitution prévoit une loi qui fixe le statut de magistrat. Et les valeurs que caractérisent les corps magistrales concourent à l’établissement d’une confiance des justiciables envers l’appareil judiciaire, sans quoi les juridictions judiciaires seront désertes de toute essence."
Il renchérit en disant que :
L’indépendance et l’impartialité doivent caractériser les magistrats pour une bonne administration de la justice dans le pays. la loi prévoit, à cet effet, des incompatibilités - Impossibilité légale de cumuler certaines fonctions ou occupations – destinées à assurer l’indépendance des magistrats dans l’exercice de leurs fonctions. L’article 65 de la loi n°06/20 du 10 octobre 2006 portant statuts des magistrats dispose : «Hormis les cas de détachement ou de disponibilité, les fonctions de magistrats sont incompatibles avec toute activité professionnelle, salariée ou non, dans le secteur public ou privé». Et en ce qui concerne la disponibilité, l’article 36 de la même loi dispose que le magistrat en disponibilité «interrompt ses services».
Selon toujours ce juriste, "la RDC n’est pas une exception, car il s’agit là d’une règle que l’on retrouve dans quasiment tous les pays démocratiques du monde, au point d’en faire une règle de droit internationalement consacrée. En France, par exemple, il est clairement dit qu’un magistrat «ne peut cumuler sa fonction avec une autre activité professionnelle (sauf enseignement, recherche scientifique, activité littéraire ou artistique, arbitrage)». La ‘‘Gazette des communes’’ explique le pourquoi de cette assertion : «L'idée est d'éviter toute subordination de droit ou de fait, susceptible de contrarier l'indépendance et l'objectivité du magistrat. L'exercice d'un mandat politique, national ou européen est tout à fait incompatible avec la fonction de magistrat. Il est donc interdit à tout magistrat de concourir sa profession avec n’importe quelle autre de quelle nature que ce soit. En outre, un magistrat, qu’il soit du siège ou du parquet, ne doit pas être dans un lien de subordination qui affectera sensiblement son indépendance avec laquelle il est sensé agir»".
Et de poursuivre qu'"il est donc scandaleux de constater que, en RDC, au moment où le chef de l’Etat prêche l’instauration de l’état de droit après plusieurs décennies de pouvoirs autoritaires, ce principe élémentaire d’une société démocratique soit foulé aux pieds par ses propres collaborateurs."
Maître Gabin Mutshaila martèle que, "dans le procès de M. Fortunat Biselele Kayipangi, dit Bifort, ex-Conseiller privé du Chef de l’Etat, le magistrat Eric Kuku Kiesse, qui a instruit le dossier avec beaucoup de préjugés et qui couvre toutes les audiences en tant que ministère public, fait partie du personnel politique du cabinet du président de la République en sa qualité de coordonnateur adjoint de la commission jeunesse et lutte contre les violences faites aux femmes à la présidence de la République, nommé par l’ordonnance du Président de la République. Il a donc rang de ministre. En clair, M. Kuku se trouve pleinement dans un lien de subordination qui affecte sensiblement son indépendance avec laquelle il était censé agir dans le dossier Biselele, un dossier sulfureux dont la trame semble clairement ficelée depuis, justement, la présidence de la République où une guerre de positionnement pousse les uns à vouloir éliminer les autres, perçus comme concurrents.
Il conclut en soulevant que:
Ce fait constitue donc une preuve supplémentaire de l’acharnement d’une justice décidément aux ordres du politique contre la personne de M. Fortunat Biselele. Dans le meilleur des mondes, et ça devrait être le cas dans ce dossier si la RDC est réellement un pays démocratique, c’est toute la procédure qui devrait être annulée pour avoir été instruite par une personne n’ayant pas qualité.