L'insécurité est persistante dans les hauts plateaux de Minembwe. Les combats entre groupes rebelles et FARDC ont contraint les populations à se réfugier dans les localités voisines.
Par La Nouvelle Afrique Magazine
Dans la région des hauts plateaux de Minembwe, cela fait des années que les populations ne vivent plus en paix. Des groupes armés font très souvent des incursions dans les villages, pillant tout ce qu’ils trouvent sur leur passage et obligeant les habitants à quitter les lieux.
Cette partie du Sud-Kivu n’a pas connu la paix depuis des décennies. Différents groupes armés, aussi bien congolais qu’étrangers, seraient responsables de l’insécurité et des mouvements de population.
Selon le chercheur Christophe Vogel, toute proportion gardée, il existe en plus des groupes armés congolais d’autres groupes ayant des liens avec les pays voisins de la RDC. "Pour l’instant, la situation reste assez tendue. Il y a des rapports d’affrontements entre différents groupes, il y a aussi des opérations de l’armée régulière congolaise qui sont menées. D’un côté, il y a des groupes qui sont contre le gouvernement de Bujumbura, d’autre part il y a des groupes alliés au pouvoir burundais. On parle aussi d’un groupe qui serait soit dirigé, soit qui aurait fait alliance avec Kayumba Nyamwasa, un dissident du gouvernement rwandais. Sur terrain, la situation est difficile parce qu’il n’est pas tout à fait clair s’il existe un tel groupe", explique Christophe Vogel.
La souffrance de la population civile
Cette situation tendue et complexe sur le terrain entraine des mouvements de population, la famine et la propagation de certaines maladies. A en croire Patrick Bahati Lusambya, membre de la société civile,
"La localité de Kanyagwe a reçu environ 150 ménages le 31 mars dernier. Certains sont arrivés sans habits, certains enfants sont arrivés séparés de leurs parents à cause des combats", a-t-il dit. "Il y a un besoin de vivres pour ces déplacés. Ils ont aussi besoin d’habits parce que la plupart d’entre eux vivent dans des familles d’accueil transitoire. D’autres trouvent des petits abris et des bâches pour y passer la nuit avec leurs enfants", ajoute-t-il.
Les événements qui ont secoué la région des hauts plateaux à Minembwe ne sont pas isolés. Cela fait plus de vingt ans que cette partie de la RDC est en proie à de nombreux affrontements et massacres.
En plein jour, les assaillants armés volent le cheptel des éleveurs Tutsi, victimes d'un conflit armé localisé sur les Hauts-Plateaux du Sud-Kivu.
Depuis 2019, les Banyamulenge affirment être la cible des milices d'autres communautés des Hauts-Plateaux (Babembe, Bafuliru et Banyindu) coalisés avec des rebelles du Burundi voisins (Red Tabara, FNL, Forebu).
"Nous avons perdu plus de 300 personnes et 240.000 têtes de bétail", avance un autre notable, le pasteur Joseph Harera. Face à ces attaques, deux milices prétendent défendre les Banyamulenge, avec l'aide d'un colonel déserteur de l'armée congolaise: "Twigwaneho" (auto-défense) et "Ngumino".
Minembwe est une enclave inaccessible par voie terrestre. La route qui monte d'Uvira et de Fizi sur les bords du lac Tanganyika est impraticable (intempérie, insécurité). A part des hélicoptères de l'Onu, un avion petit porteur en provenance de Bukavu se pose deux à trois fois par semaine sur l'aérodrome improvisé au milieu des vastes pâturages, au pied d'une montagne.
Des troupeaux, des éleveurs aux silhouettes longilignes appuyés sur leur bâton, portant costumes et chapeau type Borsalino, de coquettes maisons en briques, un marché sous un bosquet d'eucalyptus, aucune voiture: Minembwe ressemble à un petit paradis perdu au milieu des steppes d'altitude.
C'est pourtant cette petite commune paisible qui enflamme les esprits sur les réseaux sociaux et dans les médias.
Minembwe ne présente pourtant aucune continuité territoriale avec le Rwanda, la frontière passe à des dizaines de kilomètres à vol d'oiseau au nord-est des Hauts-Plateaux, entre Bukavu et la plaine de la Ruzizi.
"Des gens de l’extérieur imposent le tribalisme", soupire un membre de la société civile. "Le conflit, c'est pour nos vaches", ajoute un autre. Les vols de cheptel aurait repris depuis l'affaire de la commune de Minembwe.
DW/Nouvelle Afrique